Bolivie - novembre 2019
Témoignage des crimes contre la clase ouvrière et les paysans pauvres de Senkata
Du Réseau international pour la Liberté des prisonniers politiques et pour Justice pour Nos martyrs, nous reproduisons les interviews et les témoignages recueillis par la Radio nationale minière et le canal 2 de Huanuni aux familles des camarades tués, détenus et blessés dans le massacre de Senkata.
Toutes les interviews et témoignages ont eu lieu au moment où une délégation importante d'organisations sociales et de défense des Droits de l'homme d'Argentine s'est rendue à Senkata, en permettant les familles des victimes et des prisonniers politiques dénoncer publiquement tout ce que la presse internationale cherche à cacher : que les ouvriers et les paysans d’ El Alto et du District huit de Senkata se sont levés pour faire face au coup impérialiste et ils ont été abattus par les hélicoptères de l'armée, fusillés par des tireurs embusqués et la police meurtrière, des dizaines d'eux ont été arrêtés (y compris des mineurs) et sont torturés, des camarades violées et des centaines ont été blessées par balles, beaucoup d'entre eux craignant même d'aller à l'hôpital de peur d'être arrêtés.
Le Réseau international pour la liberté des prisonniers politiques et pour justice pour Nos martyrs se félicite de l’énorme couverture de la radio nationale minière et du canal 2 de Huanuni à Senkata, montrant la vérité sur ce qui arrive aux travailleurs et aux opprimés d’Amérique latine et du monde.
Le 29 novembre
Interview de Mario Segundo, exécutif de la Fédération départementale d’ouvriers d’usines de La Paz,
pour Radio National de Huanuni et Canal 2 Minero
Radio nationale Huanuni: Bonjour, camarades.
Mario Segundo: Bonjour à tous les mineurs, aux ouvriers et à toute la population de Bolivie.
RNH: Comment est-elle la situation aujourd’hui dans le district 8 de Senkata? Qu’est-ce que l’événement qui se déroule aujourd’hui?
MS: Merci beaucoup pour l’interview. Nous sommes très inquiets en tant qu’ouvrier et représentant de la ville de La Paz. Nous avons été convoqués dans la ville d’El Alto, dans la zone de Senkata, où il y a eu un massacre, avec un décret qui est le 4078 ; la population d’El Alto, nous avons été abattus par les militaires et les policiers.
C’est pourquoi nous demandons justice, parce qu’il doit y avoir un auteur intellectuel du fait qu’il est arrivé et qui a laissé des familles, des femmes et des enfants orphelins. Notre demande est, moi aussi en tant que citoyen d’El Alto et au nom de mes camarades, nous rejoignons à la demande des camarades qui sont touchés et nous disons aux autorités de prendre leurs responsabilités.
C’est une dictature, c’est un coup d’État. Nous, les Boliviens, voulons vivre en paix, dans l’El Alto comme dans toutes les villes. On a le droit de demander ça.
Nous avons demandé et présenté aux autorités les documents pertinents pour qu’elles nous écoutent. Il y a aussi aujourd’hui des organismes des droits de l’homme de nos frères argentins, car cela doit être clarifié.
De même, à l’exception de ce que vous faites pour diffuser, les médias disent des mensonges. Ils disent que “ils se sont tués entre eux ”, “ils sont vandales”, “voyous”… mais nous n’y sommes rien de cela. C’est le véritable peuple bolivien, un peuple humble. Et ce que nous faisons, est un crime pour la droite.
Jamais, nous ne serons pas d’accord avec ce gouvernement de droite. C’est pourquoi nous demandons qu’il faille y avoir le respect de notre humanité et du peuple bolivien.
RNH: On dit que deux ouvriers d’usines sont morts par l’énorme répression qui a eu lieu. Qu’allez-vous faire, en tant que dirigeants des ouvriers d’usines?
MS: Oui. Malheureusement, nous avons deux camarades qui ont perdu la vie. L’un de ces camarades n’a rien à voir avec les actions en cours. Le camarade sortait de l’entreprise Polar pour y aller chez lui pour se reposer et il a été abattu.
Un autre collègue a été tué de la même façon, il a été abattu dans le même endroit.
C’est pourquoi nous allons travailler avec nos conseillers et avec les organismes de droit international et les organismes des droits de l’homme qui sont aujourd’hui à la tête. En tant qu’employé et dirigeant du Syndicat des ouvriers d’usines du Département de La Paz, nous commencerons des processus pour enquêter sur les auteurs intellectuels, qui doivent être responsables.
RNH : Connaissez-vous les noms des camarades abattus?
MS : Oui, de l’entreprise “Polar”, le camarade qui a été abattu, Pedro Qisbert Mamani (37 ans), le camarade travailleur de l’entreprise “Delizia” est Devi Posto Cusi (34 ans), celui qui a été aussi abattu.
RNH : Alors, vous êtes avec la famille pour faire des actions ?
MS : Nous sommes ici en tant que dirigeants, parlant aux familles et aux endeuillées de nos camarades et nous rejoignons à tous les souffrants de ceux qui ont été tués et qui sont, à vrai dire, dans une chapelle dans la ville d’El Alto. Nous, le peuple bolivien tout entier, il faut nous organiser. Nous n’acceptons pas le retour de la droite.
Le 29 novembre
Entretien avec Noemi Jiménez, femme de Pedro, employé de Polar tué dans El Alto
Radio nationale de Huanuni : Nous sommes au District 8, dans la zone de Senkata dans El Alto, avec la femme d’un ouvrier assassiné. Comment êtes-vous, camarade ? Qu’est-ce que pouvez- vous nous dire maintenant ?
Noemi Jiménez : Bonjour. Ce n’est pas juste ce qui est arrivé à mon mari, il n’était pas du camp politique, il revenait du travail, et nous avons communiqué un moment avant que ce malheur n’arrive pas et il m’a dit que je ne m’inquiétais pas, qu’il arrivait à la maison. Il est venu au coin de Senkata pour acheter le pain spécial qu’il aimait, les flics l’ont tué.
J’ai ressenti une grande impuissance. Je demande justice pour lui qui revenait juste de son travail et c’est pour cela qu’il est arrivé à mon mari. Maintenant, on nous dit que ce n’est pas les flics qui ont fait ça, ça donne beaucoup de colère et d’impuissance qu’on ment comme ça. Nous nous rendons compte, parce que s’il y avait été entre civils il y aurait aussi fallu des policiers tués, mais il n’y a pas en eu un seul mort.
Je veux aussi donner la parole à la mère de Pierre.
RNH : Camarades, nous sommes ici pour que tous les travailleurs connaissent la vérité. Dans quelle situation êtes-vous ?
Mère de Pierre : « Je suis toute déchirée en tant que mère, j’avais trois enfants, maintenant il m’en reste deux. Je demande justice pour mon fils et je veux justice pour mes petits-enfants. Avec qui vont-ils grandir ? Ses enfants n’ont plus de père et d’autre est en chemin et ils n’ont plus justice. Ce n’est pas juste ce qu’ils ont fait à mon fils qui venait acheter du pain pour ses enfants.
Il a été assassiné dans ce coin, pas dans les gisements. Ici il n’y avait rien, seulement une foire et il a été tué là. Nous voulons justice s’il vous plaît.
RNH : Nous avons été avec les camarades ouvriers d’usines qui sont venus ici dans cette situation. Comment les camarades ouvriers prennent-ils cela ?
Noemi : Ils sont très douloureux, ils ont aimés beaucoup mon mari. Ils ont pleuré comme nous l’avons fait, parce que c’était leur ami, un bon camarade. Je suis reconnaissante parce qu’ils ne m’ont pas laissée seule. Je remercie tous les camarades de l’usine Polar (usine de couvertures).
RNH : Il faut continuer à se battre pour la justice.
Noemi : Oui, nous exigeons justice.
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