Argentine - Le 19 november 2016
Écriver un livre
J’ai dans mes mains le livre d’un homme mort
Par Rafael Spregelburd
(Note publiée le 19 november 2016)
http://www.perfil.com/columnistas/escribir-un-libro.phtml
Dramaturge et directeur/ Collaborateur du Journal Perfil
C'est le même qui pourrait se dire de beaucoup de livres. De fait, les mots écrits sont une de peu de vérifications de nos aspirations l'éternité.
Mais ce livre auquel je me rapporte est différent et la destination de son auteur n'est pas celui-là de tant d'autres hommes morts. Ils ont tué cet auteur.
Le récit prophétique de Mujámmad ordonne de planter un arbre, d'avoir un fils et d'écrire un livre. Alors que le premier travail est relativement simple et il est à la portée de n'importe quel et en tant que deuxième travail est plus ou moins raisonnable et les personnes qui ont des enfants n'ont pas l'habitude d'être individus exceptionnels, la troisième tâche est peu moins que titanesque. Certaines personnes ne plantent pas l'arbre parce que d’un commencement ils soupçonnent qu'ils n'écriront jamais son livre. Cependant, Abu au Baraa qu'ainsi l'auteur s’appelait, semble avoir commencé par la partie compliquée. Son livre s’appelle Syrie sous feu; il a eu deux filles et je doute beaucoup qu'il ait eu le temps de planter des arbres Il était un jeune de 24 ans et il a été abattu il y a une semaine par des francs - tireurs russes dans une embuscade dans les faubourgs d'Alep, quand des milliers de miliciens auto organisés essayaient de couper le cercle des troupes d'Al-Assad et ses acolytes pour arriver à Damas. Abu au-Baraa a été à la tête de la lutte, avec des centaines de Syriens, pour la liberté des prisonniers politiques du monde : ceux de la résistance palestinienne, les prisonniers basques, les ouvriers pétroliers condamnés à réclusion à perpétuité dans Las Heras au sud tranquille de l'Argentine, les prisonniers anarchistes en Grèce. Il est simple de dire que la lutte est la même partout mais, ce n'est pas tout à fait vrai : les auteurs qui ne sont pas sous le feu, ils peuvent choisir d'écrire des livres, les publier, discuter, désapprouver, réfléchir, planter des arbres, avoir des enfants, les élever, les aimer. Mais si tu dois être en Syrie: combien d'options réelles tu as ?
La distorsion des nouvelles c’est le plus grand front de bataille. Nous ne savons rien, ils s’occupent beaucoup trop de ne nous faire ne savoir rien; la mort de cet homme sera officiellement ignorée. Mais il suffit d’observer de quel côté les morts tombent, dans quelle tranchée et près de qui. Il suffit de vérifier que les bombes tombent sur les usines, comme celle-là à Urem au-Kubra, expropriée par 700 Syriens et bombardée par Al-Assad et Poutine avec l'excuse d'une guerre qui est une opération massacre.
J´espère que l’assassinat d'Abu al-Baraa sert à faire courir le voile de mensonges qu'ils ont jeté sur la Syrie ensanglantée.